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Eléments d'une politique convivialiste


En 2012-2013, un groupe d’une soixantaine d’intellectuels se sont regroupés pour rédiger le manifeste du convivialisme basé sur un double constat. D’une part, que « l’humanité a su accomplir des progrès techniques et scientifiques foudroyants, mais elle reste toujours aussi impuissante à résoudre son problème essentiel : comment gérer la rivalité et la violence entre les êtres humains ? Comment faire obstacle à l’accumulation de la puissance, désormais illimitée et potentiellement autodestructrice, sur les hommes et sur la nature ? Si elle ne sait pas répondre rapidement à cette question, l’humanité disparaîtra ». D’autre part, la multiplication « des innombrables initiatives qui vont dans le sens d’une alternative à l’organisation actuelle du monde, portées par des dizaines de milliers d’organisations ou d’associations, et par des dizaines ou des centaines de millions de personnes ».

L’enjeu est donc est donc de regrouper les forces et les énergies de toutes ces initiatives pour qu’elles « puissent contrecarrer avec suffisamment de puissance les dynamiques mortifères de notre temps et qu'elles ne soient pas cantonnées dans un rôle de simple contestation ».

Pour cela le manifeste définit ce que toutes ces initiatives ont en commun, à savoir « la recherche d’un convivialisme, d’un art de vivre ensemble (con-vivere) qui permette aux humains de prendre soin les uns des autres et de la Nature, sans dénier la légitimité du conflit mais en en faisant un facteur de dynamisme et de créativité ».

Faisant le constat de l’impuissance des politiques à sortir des vieux modèles « mortifères », les convivialistes ont voulu aller plus loin que simplement l’expression d’une réflexion philosophique.

L’ouvrage « Eléments d’une politique convivialiste » se situe dans le prolongement direct du Manifeste  paru en 2013 mais plus engagé dans le débat politique : il propose des pistes concrètes pour dessiner les contours d’un monde post néolibéral, formulées par les 60 intellectuels engagés dans le mouvement, autour de  3 propositions chacun pour une politique convivialiste (2e partie de l’ouvrage).

À partir de ces propositions, les Convivialistes sous la direction de Alain Caillé ont rédigé une synthèse rassemblant toutes ces propositions : on voit ainsi se dessiner un projet politique convivialiste organisé en 4 axes : économie, démocratie, institution, Europe et mondialité.

Bien qu’il se défendent d’avoir rédigé un programme politique à proprement parler, dans cet ouvrage les Convivialistes ont toutefois donné des pistes très concrètes qui devraient inspirer nos politiques. En cette période électorale, c’est donc un livre très utile à lire pour mettre en perspective les discours que nous livrent ceux qui espèrent nos suffrages.

« Aujourd’hui il s’agit de changer de voie, d’élaborer une nouvelle voie et, cela dans et par le développement de la nouvelle civilisation qu’incarnent déjà tant de bonnes volontés, et qui dessine de nouvelles formes dans les oasis de vie. Mais les forces obscures et obscurantistes énormes de la barbarie froide et glacée du profil illimité qui domine la civilisation actuelle progresse encore plus vite que les forces de salut, et nous ne savons pas encore si celles-ci pourront accélérer et amplifier leur développement . L’alternative est désormais : nouvelle civilisation ou barbarie » conclut Edgar Morin dans la postface de cet ouvrage.

Les 4 principes du convivialisme

Principe de commune humanité : par-delà les différences de couleur de peau, de nationalité, de langue, de culture, de religion ou de richesse, de sexe ou d’orientation sexuelle, il n’y a qu’une seule humanité, qui doit être respectée en la personne de chacun de ses membres.

Principe de commune socialité : les êtres humains sont des êtres sociaux pour qui la plus grande richesse est la richesse de leurs rapports sociaux.

Principe d’individuation : dans le respect de ces deux premiers principes, la politique légitime est celle qui permet à chacun d’affirmer au mieux son individualité singulière en devenir, en développant sa puissance d’être et d’agir sans nuire à celle des autres.

Principe d’opposition maîtrisée et créatrice : parce que chacun a vocation à manifester son individualité singulière il est naturel que les humains puissent s’opposer. Mais il ne leur est légitime de le faire qu’aussi longtemps que cela ne met pas en danger le cadre de commune socialité qui rend cette rivalité féconde et non destructrice.

http://www.lesconvivialistes.org

Alain Caillé et les convivialistes, Editions Le bord de l’eau, 2016

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